Programme 2 : Les territoires en questions

Sur le temps long, la réalité du territoire n'est pas une ici, mais palimpseste qui s'appréhende dans les mutations observables dans ses limites, son occupation et son organisation.

Le site de la romano-byzantine Zénobia-Halabiya en Syrie, fouillé par Sylvie Blétry, montre que, bien loin d'être une ligne fixe et définie, la frontière avec l'empire perse sassanide, est un limes qui se présente comme une ligne mouvante, d'autant que le contrôle de la région est assuré par les tribus agissant pour l'un ou l'autre des empires. Les résultats des fouilles ont été publiés dans un ouvrage collectif. La guerre a empêché la poursuite des recherches. Mais en 2014-2015, en assocation avec le LabEx Archimède et avec des ingénieurs et des chercheurs associés de l'UMR 5140 (Archéologie des Sociétés des Méditerranées), a été créé un programme ayant pour objet l'étude diachronique et la mise en valeur du site de Tell Qilah (Territoires Palestiniens, gouvernorat d'Hébron), occupé depuis l'Âge du bronze moyen jusqu'à la période ottomane et intéressant pour les évolutions de l'habitat sommital, de l'exploitation agricole en terrasses et des nécropoles, avec comme objectif à moyen terme une mise en valeur patrimoniale. Ce programme se poursuit.

Antoine Pérez conduit une étude comparée de deux sysèmes paysagers antiques, le Jôri de Nakatsu (Kyushu, Japon méridional) et la limitatio, réseau géométrique qui structurait le territoire des cités du bassin méditerranéen romain. À l'État impérial antique a succédé, au Japon comme dans l'Occident romain, une période féodale caractérisée par l'éclatement de l'autorité politique en multiples cellules autonomes, processus qui a eu sur les territoires des conséquences semblables, avant que les révolutions industrielles et l'essoir urbain n'achèvent de démanteler, en Europe comme au Japon, la trame paysagère antique. Le paysage est là encore une écriture du pouvoir. Le lien topographique organique unissant le Grand Sanctuaire shintoïste d'Usa et l'espace construit - la Voie, le Cadastre et le Sanctuaire - manifeste la mise en place régionale du régime politique des Codes, à l'époque de Nara (VIIe-VIIIe s.), en même temps qu'il exprime la nature idéologique d'un gouvernement impérial japonais fondé sur une combinaison originale du syncrétisme shinto-bouddhique et du culte de l'Empereur. La collaboration avec les collègues japonais (Université de Beppu ; de Nagasaki), qui se poursuit, a donné lieu à un premier ouvrage  : La voie, le Cadastre et le Sanctuaire. Étude comparée des paysages antiques du Japon et de l'Occident romain.

Le programme « Amida » se poursuit. Martine Assénat a ouvert, depuis septembre 2019, un nouveau projet (Atlas, Mesure, Innovation, Diachronie, Anatolie) lauréat des RNMSH-FMSH-TGIR HN (Réseau national des Maisons des Sciences de l'Homme - Fondation maison des Sciences de l'Homme - HumaNum). S'appuyant sur la collecte, la production et l'étude des nombreuses sources, l'équipe AMIDA intègre des données historiques, géographiques, patrimoniales et environnementales relatives à Diyarbakir/Amida et à ses territoires (haute vallée du Tigre) dans un atlas exploratoire numérique pour se doter d'outils mettant en synergie de multiples formes d'analyses et de recherches. Les représentations spatiales et temporelles élaborées à partir de la caractérisation, de l'annotation et de la qualification des données, posent la question de savoir ce qui, d'un point de vue interdisciplinaire, fait territoire. À cette fin est créé un hub de ressources comprenant un SIG, des bases de données et des documentations associées. Cet outil est aussi destiné à favoriser l'étude et la protection du patrimoine vulnérable et menacé, matériel et immatériel, de cette métropole du Sud à croissance rapide. Multilingue, évolutif et participatif, l'atlas est adossé à Huma-Num, répond aux normes FAIR, et est largement partagé. (Site internet en construction)

Dernière mise à jour : 23/04/2024