Programme 5 : Guerre et violence

Porteurs : G. Lepan, A. Asso, M. Blaise, A. Delahaye, S. Triaire

La définition de la guerre et de la violence qu’elle contient et autorise a suscité des travaux collectifs : G. Lepan a ainsi travaillé au sein du « Groupe Rousseau » sur la confrontation entre Hobbes et Rousseau, qui rend manifeste un déplacement considérable, d’une approche naturaliste de la guerre, par les passions individuelles, transférables aux États, à une approche non seulement juridique mais aussi politique de la guerre. Pour Hobbes, le modèle à l’œuvre dans la condition humaine est celui de la guerre de chacun contre chacun, ce qui signifie que la guerre est d’abord une manifestation de la nature humaine individuelle, qui peut ensuite rendre compte de tous les types de rapports conflictuels envisageables. La transformation de l’état d’égalité en un état de guerre tient, pour partie, au fait que le souci de la préservation de soi s’accompagne du désir de la reconnaissance de soi par autrui. Pour Rousseau en revanche, la guerre, en tant que rapport social mettant aux prises des États, doit être reliée aux rapports de dépendance et d’inégalité qui caractérisent leurs relations. Ce sont les conditions de la vie sociale (inégalité économique, dépendance mutuelle, oppression politique), qui sont les causes de la guerre. Celle-ci n'est donc pas réductible à un rapport de crainte, de haine ou de passion. L’institution du droit positif est paradoxalement à l’origine de la guerre proprement dite.

Autrement dit, il n’est pas de guerre sans institution de l’État comme mode spécifique d’organisation sociale, mais pas non plus de société civile sans guerre. La dérégulation de la guerre comme le retour de la guerre de haute intensité rendent nécessaire une réflexion sur la violence. Il y a bien eu, à travers les âges, une tentative des hommes de juguler la violence, de la codifier lorsqu’elle prend place dans cet espace de « mauvais temps », pour reprendre l’expression de Hobbes, que l’on appelle « la guerre ». La guerre n’est pas le brigandage, le soldat sans code d’honneur est un bandit. Il n’y a pas nécessairement de contradiction entre une entreprise de violence et de destruction et une justification d'ordre moral et légal. On peut tenter de rendre compte de la guerre non exclusivement en termes de passions et d'intérêt, de logique de puissance et de nécessité (à la manière « réaliste » d'un art de la guerre selon Machiavel), mais dans la perspective d'une justice dont il reste à éclairer le sens. Toutefois cet effort de distinguer la guerre de la barbarie, du déchaînement de violence pure et simple, achoppe depuis un siècle environ. Le droit de la guerre n’a-t-il donc jamais été qu’un discours juridico-moral sur la guerre, indispensable certes, mais sans traduction concrète sur la pratique de la guerre, voire un instrument de justification ?

Dernière mise à jour : 06/05/2025